Pierre Guillemette
22 juin 2004
Je venais tout juste d’avoir 18 ans. Nous étions à la veille de la St-Jean-Baptiste et bien entendu, je n’avais qu’en tête de préparer la fête qui s’en venait. À l’habitude cette période de l’année est très attendue pour un adolescent, c’est un moment excitant ! La fin des classes, le début de la saison estivale, les vacances… J’étais loin de m’imaginer que je m’apprêtais à recevoir un appel qui allait changer ma vie.
Tôt le matin, une infirmière de l’Hôtel-Dieu de Roberval m’attendait au bout du téléphone pour me demander de venir à l’hôpital parce que le médecin voulait me rencontrer. La veille, j’avais passé des tests et fait des prises de sang parce que je voulais être engagé comme agent de sécurité à l’hôpital pour l’été. À cette époque, je venais de compléter ma première année en techniques policières.
Je me suis donc présenté à l’hôpital en short et en t-shirt, pensant qu’on allait me dire que tout était beau. Je ne me doutais jamais que ma vie allait complètement basculer ce jour-là.
On dit qu’une image vaut mille mots…
Vous vous souvenez sans doute de cette publicité où toutes les personnes tombent vers l’arrière comme si une explosion survenait à chaque nouvelle annonce dans la famille. Dans mon cas, ajoutez à cela un acouphène foudroyant et douloureux qui a débuté subitement suite à l’annonce du médecin. Je me rappelle très bien que je voyais les lèvres du médecin bouger mais je n’entendais plus ce qu’il me disait. Cette journée-là, il m’annonçait que j’étais atteint d’une leucémie. Il ne pouvait pas me dire à quel stade la maladie était avancée mais je devais rapidement aller faire d’autres examens pour en savoir plus.
Avec mes faibles connaissances sur ce cancer à l’époque, je me demandais : « Combien de jours me reste-t-il à vivre? Combien de semaines me reste-t-il à vivre? Avec un peu de chance, combien de mois me reste-t-il à vivre? ». Je croyais qu’on mourrait presque systématiquement avec un tel diagnostic. Je suis sorti de l'hôpital, direction la maison de mes parents à St-Félicien. Je ne peux pas vous dire combien de coups de poing que j’ai pu donner sur mon volant dans ma voiture pendant ces longues minutes sur la route. Un mélange de colère, de peur, de peine, et d’angoisse me submergent à l’idée que je devais aller annoncer cela à ma magnifique petite maman d’amour. Fabienne, une mère sensible et émotive pour qui ses enfants sont toute sa vie. Son bébé, comme elle aime si bien m’appeler encore aujourd’hui, était atteint de la leucémie. Son ``Pierrot’’ était atteint du mot que l’on ne veut pas prononcer, surtout pas à 18 ans… le CANCER.
Savez-vous quoi? Ça n’a vraiment pas été facile mais en même temps, ce fût un point tournant pour le reste. Quand j’ai annoncé la bombe à mes parents, ma petite maman a fondu en larmes, comme toute maman l’aurait fait. Mon père Martin m’a tellement impressionné à ce moment-là. Je m’en souviens comme si c’était hier. J’étais assis sur le divan à serrer ma mère dans mes bras. Mon père, debout devant moi, droit comme une barre, solide comme le roc, m’a dit calmement : « Ça va ben aller mon gars, ça va ben aller! On va aller passer les tests, puis on verra après ». On verra ! Ha! Ha! Ha ! La phrase préférée de mon père. On l’a tellement entendue souvent mon frère et moi! À ce moment-là, il ne le savait peut-être pas, mais il avait fait une grosse différence. La force qu’il avait su me démontrer m’avait calmé, rassuré et permis de me ressaisir pour me préparer à affronter la suite avec courage et détermination !
Cette année-là, j’ai dû faire de la chimiothérapie pendant 1 an en continuant mes études de techniques policières. On contrôlait la propagation de la maladie de cette façon mais les médecins avaient été bien clair avec nous, le seul moyen pour que je guérisse était à l’aide d’une greffe de moelle osseuse. Suite à cette année de traitement en chimiothérapie, la maladie a commencé à gagner du terrain. Les médecins nous avaient expliqué leurs inquiétudes puisque normalement ce sont les enfants ou les personnes âgées qui sont frappés par ce type de leucémie. Ils avaient très peu de statistiques pour un jeune adulte. Comme le système se développe rapidement à 18 ans, ils craignaient que la maladie gagne du terrain à grande vitesse. J’avais peut-être une petite chance, mon frère. Les médecins nous ont expliqué que les chances qu’il soit compatible étaient de 25%. Pour nous donner une idée, ils avaient dernièrement testé un patient qui avait une douzaine de frères et sœurs et qu’il n’y en avait aucun de compatible. On était un peu assommé…
La vie m’a souri! Quand le médecin nous a annoncé les résultats, il avait commencé en me disant : « Ne t’achète plus de billets de loto mon gars, tu viens de gagner!» Mon frère et moi étions compatibles 6 sur 6, selon leurs critères de compatibilité et mes chances de survie étaient très bonnes, environ 75%. Il reste tout de même qu’on tire un dé à 4 faces dans les airs et qu’on souhaite qu’il tombe sur les 3 bons côtés. J’avais besoin d’être en forme, en santé et prêt mentalement pour me donner un maximum de chance.
Cet été-là, mes parents ainsi que mon frère Luc et sa conjointe Carole, que je considère comme ma sœur, avaient mis leur emploi et leur vie de côté. Chacun a été là pour moi à chaque moment, à chaque étape de mon périple. Vous ne pouvez pas vous imaginer l’impact que leur appui a eu sur ma guérison, mais surtout, sur la façon dont j’ai affronté mon cancer. Ma famille m’a soutenu lors de la greffe et des autres étapes. Tous ensemble, UNIS ET BRAVES! Une équipe qui a été à mes côtés du début jusqu’à aujourd’hui. Ils m’ont donné la force, le courage et l’espoir pour passer à travers. Vous ne pouvez pas vous imaginer la différence que ceci a pu faire pendant tous ces moments difficiles. L’énergie qu’ils m’ont donnée pendant toutes ces semaines est impossible à expliquer rationnellement. Je suis devenu Super Pierre! Ma détermination était inébranlable. Cette année-là, contre toute attente, j’ai recommencé à jouer au hockey compétition dans le junior au début de l’hiver. Avec mon équipe, comme gardien de but, j’ai remporté pour une première fois les séries éliminatoires. J’avais l’impression qu’il n’y avait rien à mon épreuve. Une famille qui t’aime et t’encourage, c’est fou comment ça peut rendre quelqu’un puissant!
2 ans plus tard, j’ai reçu un second diagnostic de cancer… une tumeur de la peau sur la fesse gauche! Comme il n’y avait plus rien à mon épreuve, une simple opération eut suffi pour m'en sortir. J’étais encore Super Pierre!
À ce jour, je n’ai rien eu d’autre et j’ai une santé de fer ! Quand les gens me disent que ce n’est pas croyable d’avoir été aussi malchanceux, je leur réponds : « Au contraire, la vie m’a fait un immense cadeau. Pour moi, toutes ces épreuves et ces batailles ont été un cadeau de la vie. Maintenant, chaque rencontre, chaque expérience, chaque petit moment de bonheur, je le savoure et je remercie la vie pour tout ce qu’elle m’apporte! » Un de mes très bon ami d’enfance, Sébastien, m’a dit un jour, alors qu’on mangeait un spaghetti ensemble : « Toi Pierre, ça me fait suer parce qu’on a le même spaghetti devant nous mais je te regarde le manger et il a tellement l’air meilleur que le mien. C’est frustrant ! » Vous ne pouvez pas vous imaginer à quel point je me suis souvent fait dire ce genre de chose.
En fait, j’ai seulement compris avec ces expériences que la vie n’est pas un acquis mais bien un cadeau et que l’on doit en profiter au maximum et l’apprécier à sa juste valeur.
Tout juste retraite après 32 ans de service SQ, tu es un fier porteur du msg et de l uniforme, quel histoire et inspiration pour la jeune génération policière. lors de ton entrevue tu as sûrement arrache une larme ou deux aux officiers devant toi… alors jte dis chapeau !!! déjà hâte d avoir mon armure et casquette pour transmettre ton msg d espoir !
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Bravo pour ton initiative très belle cause félicitation encore une fois !!
En 2018, j’ai goûter le goût amer d’une leucémie LMA. Que j’ai « pitché » au fin fond de l’univers. Aujourd’hui, en rémission, je vais bien. J’ai reçu plein d’amour et de soutien de la part de ma famille, ami(e)s et même de gens ayant vécu aussi avec un cancer. Le plus difficile pour moi, était de ne pouvoir partager avec quelqu’un qui vivait avec un cancer similaire. Je trouve bien, que le cancer du sein se rende visible avec le ruban rose auquel je ne m’associe pas. La moustache du movember non plus. Alors vous comprenez que UNIS ET BRAVE, ça me rejoint. Suite a votre reportage, passé au nouvelle, je me suis senti interpellé. J’ai donc commandé mon chandail. Je vais le porté fièrement avec une pensée remplir d’amour, de confiance et de courage à tous ceux qui luttent avec espoir. Je vous suggère de faire une épinglette avec votre logo. J’en veux un d’avance. Bravo pour votre bel initiative. Bon succès dans votre lutte avec cette « merde » de cancer.
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